lundi, avril 27, 2020

CAFFÈ et APERITIVO ITALIANI








C’est au Ve siècle avant J.C. que le médecin grec HiIPPOCRATE prescrivit aux patients atteints d’inappétence un médicament de son invention : le vinum hippocraticum, du vin blanc sucré, dans lequel avaient macérés des fleurs (de thym, absinthe ou rutacée). L’ancêtre de l’apéritif moderne était donc déjà consommé dans la Rome antique : le "mulsum" (recette) à base de vin et de miel. La boisson était en général offerte au début du dîner romain en même temps que le "Gustus » , que nous appellerions les entrées ou antipasti en italien.
L’étymologie de apéritivo ou (apéritif en français) ne laisse aucun doute : il vient du latin aperitivus (qui ouvre), une boisson qui stimule et "ouvre" la sensation de faim : l’appétit.


L’APERTIVO ITALIANO naquit à Turin dans la petite bottega de spiritueux de Monsieur ANTONIO BENEDETTO CARPANO,  qui en 1786 inventa le VERMUT : du vin blanc additionné à d’une infusion de plus de trente sortes d’herbes et d’épices. Cette " spéciale bevanda (boisson)" qui fut ensuite exportée dans toute l’Europe pour être ensuite produite par CINZANO et MARTINI & ROSSI, devenant avec l’appellation "Martini" l’apéritif par excellence, à boire pur ou comme base des nombreux cocktails à venir (pour ne citer que l'historique Negroni  en Italie). C’est ainsi qu’Il s"ouvrirent dans plusieurs villes d’Italie au cours des dernières années du XVIIIe des caffés, particulièrement actifs dans les capitales des actifs les capitales des provinces : Turin, Gênes, Florence, Venise, Rome, Naples, Milan...

CARLO GANCIA au milieu du XIXe siècle proposa une version différente du vermouth : le vermouth GANCIA. Ce fut l’apéritif officiel de la maison royale, qui accorda l’autorisation d’utiliser la formule "Bianco Gancia, Vermouth dell'Aristocrazia e della Regalita", appelation qui se voulait  un message de l’indépendance et de l’unité de l’Italie comme le fut l’apéritivo "Garibaldi" de Gancia utilisé aussi comme véhicule de propagande

L’aperitivo devient ainsi un véritable rituel qui se déroule de 18.00 à 21.00, comme un moment de détente après le travail et avant le dîner.




LES CAFFÈ/CAFÈS
Umberto Boccioni Caffè Camparino Echaufourrée sous la galerie,1910 
Le café au XVIIIe siècle devint un lieu de sociabilité et très vite un centre de diffusion des nouvelles et des actualités.'Etant des centres de transmission, les discussions intellectuelles y ont naturellement prospéré. Au café, tout le monde avait droit à la parole, même s’ils n’étaient pas riches ou gentilshommes : « Le comptoir d'un café est le parlement du peuple. » écrivait Balzac... Dans ces lieux, on discutait et on se disputait à propos de tous les grands sujets, religion, politique, arts.

Pour dire un mot de la France, on pense qu’il y avait presque 3 000 cafés à Paris à la fin du XVIIIe siècle, parmi lesquels, Le Procope et le Café de la Paix qui existent encore aujourd’hui.


 
Le PROCOPE fut le plus célèbre lieu de rencontre des Lumières : Voltaire, Rousseau et Diderot le fréquentèrent et ce fut le lieu rendez-vous des Encyclopédistes. Benjamin Franklin et Thomas Jefferson le fréquentèrent aussi lors de leurs séjours parisiens en quête de soutien à la cause de l’indépendance américaine. Et pendant la Révolution française, il fut un lieu de rencontre du Club des Cordeliers Danton et Marat. 
À citer aussi, le CAFE DE LA REGENCE, décrit par Diderot dans Le Neveu de Rameau comme étant le lieu incontournable pour jouer aux échecs, et qui vit aussi défiler Robespierre et Napoléon, avant de fermer lors de la première moitié du siècle suivant.

Les caffè italiens furent également des lieux de discussions littéraires et politiques, de sorte que la plus importante revue des Lumières italiennes s’appelait justement Il Caffè car les articles imitaient une discussion de "comptoir". Ces caffè italiens, à la différence des anglais et des français, étaient également fréquentés par la noblesse. Dans certaines villes, il y avait même le café des aristocrates et le café de la bourgeoisie.

Les premiers naquirent à VENISE et dès 1683 on parle du Caffé AL'Arabo...en 1720, s'ouvrait à Venise celui qui est actuellement le plus ancien café au monde, le CAFFE FLORIAN, piazza San Marco, l’un des trente cafés de la place Saint-Marc, fréquenté par Carlo Gozzi, Francesco Algarotti, Antonio Canova[, Carlo Goldoni et Giacomo Casanova. En 1750, ouverture du CAFFÈ LAVENA (à l’origine appelé Caffè Regina de Hongrie) et en 1775 le CAFFÈ QUADRI de Venise, fondé par un immigré de Corfou, alors territoire de la Sérénissime.  L’atmosphère des cafés vénitiens a été immortalisée dans La bottega del caffè du dramaturge vénitien Carlo Goldoni, où sont décrits les rapports entre bourgeois en ascension et nobles décadents.



En Italie nombre de caffè historiques survivent encore  : en 1733 naît à Florence le CAFFÈ GILLI, le plus ancien local de la ville. En 1760 fut fondé l’ANTICO CAFFÈ GRECO de Rome, ainsi nommé car ouvert par un levantin. En 1772 le CAFFÈ PEDROCCHI de Padoue et en 1775 le CAFFÈ DELL’USSERO de Pise où se rencontraient les professeurs et les intellectuels de ces deux villes universitaires.  En 1780 le CAFFÈ FIORIO de Turin, le caffè du Risorgimento. En 1931 le HARRY'S BAR à Venise.











L'APERITIVO

Les documents d'archives ont donc montré que l'apéritif est apparu en 1786 à Turin quand Antonio ensuite Benedetto Carpano inventa un vermouth ... exportée dans toute l’Europe pour être ensuite produite par CINZANO et MARTINI & ROSSI, devenant avec l’appellation "Martini
Au cours du XIXe outre des Blancs classiques, ces apéritifs se buvaient couramment en Italie servis dans les cafés à la mode, mode qui se répandit dans toute l'Europe. Au début des années 1900, ils passèrent l'Atlantique pour conquérir les États-Unis et l'Amérique latine.
Les cocktails se sont répandus à la fin du XVIIIe siècle, en Angleterre et aux États-Unis. Leur consécration vint pendant la prohibition aux États-Unis, dans les années 1920 : l'ajout d'une autre boisson permettait de masquer le goût d'un alcool de contrebande de mauvaise qualité. 
Selon le barman du Antoine's Restaurant, de La Nouvelle-Orléans, le mot cocktail viendrait du fait qu'un barman français servait une boisson, du Bitter, dans un coquetier à deux anses, et que les Anglais ne comprenant pas le mot « coquetier » (prononcé à peu près « coquetiel » à l'époque), auraient compris cocktail...?




 
MISCELLAZIONE FUTURISTA
Le futurisme est un mouvement littéraire et artistique européen du début du XXe siècle (de 1909 à 1920/30), qui rejette la tradition esthétique et exalte le monde moderne, en particulier la civilisation urbaine, les machines et la vitesse. Plus qu'un mouvement, le futurisme devient un art de vivre et une véritable révolution anthropologique. Il touche tous les arts plastiques, la littérature, le cinéma, la photographie, le théâtre, la mise en scène, la musique, le bruitisme, l'architecture, la danse, la typographie, les moyens de communication, et même la politique.

En Italie, surtout à Milan et à Turin, il y eut l’heureuse parenthèse du Miscellazione futurista, une période mémorable pour le bar appelé le quisibeve, (l’utilisation de mots étrangers n’étant pas permis) qui produisit des brillants polybibites (cocktail) préparées avec des ingrédients du terroir tels que grappa, arzante (brandy), vins, vermouth, amers et bitter et dans lequel la créativité des "mélangeurs" a été accompagnée par celle des graphistes et des artistes comme Fortunato Depero, Nikolay Dugerhoff, Ugo Pozzo, qui firent fortune de marques comme Campari et Amaro Cora... qui vont accorder au graphisme publicitaire le même pouvoir de persuasion que celui accordé à la propagande politique.


L’association Campari-Depero constitue un cas d’école de la publicité italienne et scelle une collaboration créative qui, pour Depero,restera unique concernant ses rapports avec un commanditaire dans le domaine de la publicité. Un moment important de la collaboration entre Campari et Depero a eu lieu avec le Numero Unico Futurista Campari de 1931 en ouvrant la porte à de nouvelles initiatives entre art et exigences publicitaires. Dans le même temps cette œuvre annonça la fin de la collaboration entre l’entreprise et l’artiste, qui cependant avant de se terminer donna vie à la bouteille originale d’un nouveau produit qui allait marquer l’histoire de la production d’alcools : le Campari-soda en 1932. Sa petite bouteille conique unique, dessinée par Fortunato Depero, est encore aujourd’hui icône de l’apéritif italien.
La forme conique est distinctive dans l’œuvre de Depero pour Campari dès le milieu des années Vingt. L’artiste la dessine dans un croquis en 1925, "Marionnette qui boit le Camparisoda". Le Camparisoda auquel se réfère le titre est celui préparé par les barmans et non le produit qui arrivera sur le marché sept ans plus tard. Une marionnette sirote un apéritif d’une bouteille qui semble avoir les traits de la bouteille de Camparisoda! Le croquis deviendra en 1926 un modèle en bois verni en blanc et toujours en 1926 un manifeste réalisé avec la technique du collage de papiers colorés.

FORTUNATO DEPERO



NIKOLAY DUGERHOFF et UGO CARA






Le futurisme Miscellazione futurista, qui toucha le bar=quisibeve, et la création de cocktails=polybibites  naquit ainsi à l’intérieur de quelques clubs milanais comme le Caffè Centro, Savini, Camparino, Cova, lieux où les clients échangeaient des idées, des opinions et même quelques coups de poing. Le Café Camparino (cf. tableau de Boccioni) a enregistré depuis 1867, 87 ruptures de vitrines de la part de manifestants politiques qui faisaient des incursions sous les portiques de la Piazza del Duomo et dans la Galerie (Milan).... Pour aller plus loin, la rubrique de Il Calice di Ebe

Pendant ce temps, au BAR CASONI de Florence, en 1919, le comte Camillo Negroni et le barman Sosco Scarselli  inventèrent le NEGRONI : le comte trouvait trop léger l’AMERICANO (campari, vermouth, eau de selz)inventé en Italie en 1861 au BAR de GASPARE Campari  et demanda au barman de remplacer l’eau de seltz par du gin corsé. L’Américano à la mode du comte Negroni devint alors le célèbre Negroni

Suivirent les années de guerre et de reconstruction durant lesquelles aller au bar n'était pas la priorité...Et ainsi, après les premiers signes de reprise de l’après-guerre, on se retrouva dans les bars à regarder la télévision et à boire au moindre coût. Néanmoins la boisson italienne célèbre dans le monde entier : le Bellini, fut créé par Giuseppe Cipriani au Harry's Bar de Venise en 1948 à l’occasion de l’exposition consacrée à Giovanni Bellini. 

C'est dans les années 60 et 70, celles du boom, qu'on commençe à boire des cocktails sérieux. En 1972, au Bar Basso de Milan, le bartender Mirko Stocchetto utilisa "par erreur" du mousseux plutôt que du gin dans un Negroni.  Un « Sbagliato » (erreur  en italien) qui mena à la création de ce classique toujours apprécié.... 
Suivirent deux décennies où dans la plupart des bars, l’apéritif se transforma en un déballage de buffets avec des aliments immangeables et des cocktails imbuvables et chers. Aujourd'hui cette période de décadence à contribuer à la renaissance de l’apéritif et des bars italiens. 


Quelques classiques
DRY MARTINI
6 cl de gin
1 cl de vermouth sec
shake fortement avec des glaçons.
Ajouter un zeste de citron avec la rondelle en décoration ou bien ajouter une olive.


AMERICANO
2 cl de campari
2 cl de vermouth rouge (martini, cinzano)

NEGRONI
2 cl de campari
2 cl de vermouth rouge (martini, cinzano)
2 cl de gin


MIMOSA
8 cl de Champagne
1 trait(s) de Cointreau
4 cl de Jus d’orange

AMARETTO SOUR
2 doses Amaretto
1/2 dose de jus de citron 
1/2 dose sirop de sucre
Schake avec glaçons
BELLINI
Dans un verre 2/3 de purée de pêche pour 1verre de champagne
TINTORETTO
Dans un verre 1/3 de jus de grenade et 2/3 de Prosecco . Complétez avec les glaçons et servez avec une rondelle de citron.
ROSSINI
8 cl de Champagne
1 trait(s) de Cointreau
4 cl de Jus d’orange

SPRITZ
•Prosecco 3/6
Aperol 2/6
Eau gazeuse 1/6
Une tranche d’orange

En TOSCANE
 Disons non à la dictature du spritz! 
Nous aimons l’apéritif fait avec goût et raffinement, authenticité et simplicité : en un mot, avec du vin! La Toscane est une terre de grands vins, pourquoi ne pas l’honorer même pendant l’apéritif? ... 
et de citer : Bolgheri Arundineto, Chianti Classico Colli Aretini Mannucci Droandi, Chianti Classico biologico Torre Bianca, Vermentino e rosato di Bolgheri, Boscatico 2008...


Et qui mieux pour accompagner ce bon moment (après l'annonce)... ?